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ARCHEOLOGIE NIVERNAISE

ARCHEOLOGIE NIVERNAISE

Site dédié à la préhistoire, proto-histoire et période gallo-romaine dans la Nièvre (58)


Site néolithique de "La Grande Pièce" (Commune d'Imphy)

Publié par Archéologie-Nivernaise sur 24 Avril 2024, 22:12pm

Catégories : #Néolithique

Site néolithique de « La Grande Pièce »

Commune d’Imphy (Nièvre )

par Christian BEGO

 

Historique des prospections :

Mes prospections ont débuté en 1991, puis se sont prolongées au rythme des labours jusqu' à la fin de l'année 1997. L'étude du matériel lithique fut entreprise lors de travaux collectifs avec l’association G.N.P (Groupe Nivernais de Préhistoire) malheureusement dissoute à ce jour.

H.Jacquinot écrivait à la fin du siècle dernier qu’il avait trouvé près du domaine de Linière, entre la ferme de ce même nom et le hameau des Commes, quelques silex taillés qui, par leur facture grossière et la mauvaise qualité du silex, lui ont paru provenir de Sauvigny (?)

Nous ne possédons pas plus d'éléments quant à la localisation de ses découvertes.

Situation géographique

L'outillage a été recueilli au sud-est de la commune, sur les hauteurs d'Imphy au lieu-dit "La Grande Pièce", à une altitude d'environ 190 mètres. Le site se trouve à proximité d'une source et de deux cours d'eau situés au nord : l'Ixeure    et la Sardolle qui se jettent dans la Loire à l'ouest de la commune. Plus à l'est, à une altitude de 230 mètres se trouve la ferme de Linière. 

Le terrain concerné, de nature sablonneuse, est situé sur une zone en pente douce vers le nord-est.

 

Le débitage

Les Nucléi :  (planche I)

Les nucléi sont au nombre de 17 représentant 8,5% du matériel recueilli, avec une majorité de nucléi à éclats. 9 sont polyédriques (1 a été réutilisé comme retouchoir), 6 sont prismatiques (3 comportent 2 plans de frappe) ; 1 est pyramidal à 1 plan de frappe ; 1 comporte 2 enlèvements par 2 éclats opposés. Ils sont de dimensions très réduites de l'ordre de 2,8cm à 6,5cm pour le plus gros.

Le premier de forme allongée a une longueur de 12cm pour une largeur de 8cm et une épaisseur de 6cm.    Le second de forme globuleuse mesure 8cm de longueur pour une largeur de 7cm et une épaisseur de 4,7cm.

A noter également dans cette catégorie, un fragment de nucléus et une tablette de ravivage.

Ce silex probablement local, avec des rognons de petites dimensions a été utilisé au maximum. Sa mauvaise qualité pourrait expliquer le débitage anarchique des enlèvements



Nucléus: Bloc de matière première pouvant être directement transformé par la taille en outil : galet taillé, biface par exemple. Dans les autres cas, le bloc est débité en produits appelés éclats, lames, lamelles qui seront eux-mêmes le support d'outils. Le bloc débité prend alors le nom de nucléus.

 


Les éclats : (planche II)

Les éclats sont au nombre de 132 représentant 66 % du matériel recueilli.    On dénombre 12 éclats retouchés (3 avec retouches d'utilisation inverse, 3 avec encoches, 2 cassés en charnière avec retouches d'utilisation inverses); 7 éclats ayant pu être utilisés dont certains comportent des retouches d'utilisation inverses.

La dimension de ces éclats varie entre 1,4cm pour le plus petit et 10cm pour le plus grand, nous donnant une moyenne de 2,9cm. L'analyse des talons fait ressortir une prédominance de talons lisses (43 %) qui démontrerait le peu de préparation de ces talons de frappe. L'étude des talons nous donne le décompte suivant :

Cortical

3

3,44 %

Dièdre

7

8,04 %

Facetté

10

11,49 %

Facetté convexe

4

4,59 %

Facetté plan

2

2,29 %

Linéaire

10

11,49 %

Lisse

38

43,67 %

Punctiforme

12

13,79 %

Retouché

1

1,14 %

Les talons absents, cassés ou disparus, représentant 45 éclats (34%) ont été retirés du décompte.



Eclats :Produit de débitage intentionnel présentant deux faces: une face supérieure et une face inférieure appelée face d'éclatement.  Lames: Diffère de l'éclat par ses dimensions . Sa longueur est égale ou dépasse le double de sa largeur. Une lamelle diffère de la lame par ses petites dimensions. 


Les outils

 Les grattoirs :  (planche III)

Les grattoirs sont au nombre de 9, ils sont prédominants (26,5%) dans l'outillage de la station. Parmi eux, nous trouvons : 

  • 4 grattoirs sur éclat dont le plus grand n'excède pas 3,4cm, 1 grattoir sur éclat laminaire à talon lisse ayant une longueur totale de 8,2cm pour une largeur de 4,7cm et une épaisseur de 2 cm. Son front est rectiligne avec des retouches abruptes (fig.1).
  • 2 grattoirs atypiques dont un ayant subi l'action du feu (double patine), l'autre dont le tranchant a été abîmé par un choc


Grattoirs : L'usage du grattoir n'est pas connu avec certitude : les chasseurs s'en servaient probablement pour gratter les peaux comme le faisaient les esquimaux au siècle dernier.   C'est l'outil universel, le plus répandu de toute la préhistoire. Il peut servir à rectifier les aspérités de l'os ou du bois, couper, servir de levier (décrocher de son support l'objet en os déjà préparé. Les variétés sont nombreuses: grattoir caréné, à museau, circulaire, double, sur extrémité de lame ..........

 Les burins :   (planche IV)

Les burins sont au nombre de 4 ne représentant que 12% des outils dont 1 burin d'angle sur fracture (fig.4), 1 burin sur éclat laminaire (fig.5), 2 micro-burins sur éclat (fig.6 et 7). A noter 2 éclats assimilés à des pseudo-burins dont 1 du type "burin de Siret" (fracturation dans l'axe de débitage).

 



Burins : Les gisements livrant de nombreux os ou bois travaillés donnaient aussi des outils que l'on appela burin et dont le principe est d'avoir un tranchant étroit ou biseau.  Celui-ci est obtenu en détachant un éclat dans l'épaisseur d'une lame ou d'un éclat.Le burin n'est cependant pas le seul instrument capable d'un tel travail et un angle d'éclat ou de lame brisée par exemple était certainement aussi efficace. Les variétés sont nombreuses : burin dièdre,busqué, de Noailles, bec de perroquet, caréné, d'angle sur cassure .......


Les racloirs : (planche V)

Les racloirs sont au nombre de 5 (14,7%) dont deux racloirs double : le premier est un racloir droit et convexe avec retouches abruptes sub-parallèles. Il a gardé une grande plage de cortex sur sa face supérieure (fig.10), le second est fracturé transversalement ; 2 racloirs latéraux simples convexes dont le premier est taillé dans un éclat long et a gardé une zone de cortex à sa partie proximale (fig.8), le second taillé dans un silex gris clair, possède des retouches écailleuses (fig.9) ; 1 racloir latéral convexe avec troncature proximale possédant des retouches marginales courtes. A noter dans cette catégorie un autre outil à mettre dans les racloirs-bifaces. Son talon est lisse, il comporte des retouches écailleuses envahissantes avec retouches scalariformes opposées. Le bord opposé au tranchant a disparu (fracture récente). L'hypothèse d'un biface n'est donc pas totalement à écarter.   



Racloirs : Les racloirs sont des éclats dont un des grands cotés est transformé en tranchant. Le tranchant est habituellement convexe, mais peut bien entendu être rectiligne, concave ou sinueux. Si le racloir n'a qu'un bord retouché il est dit simple. Il est double s'il a deux tranchants . Les variétés sont très nombreuses avec cependant un dénominateur commun qui est la nature des retouches. Le racloir est l'outil de base des Paléanthropiens qui vécurent de - 100 000 à - 50 000 ans comme représentant l'homme de Neandertal. C'est donc un outil aux fonctions multiples : racler, couper, scier. Il est caractéristique de la culture moustérienne . Le racloir sera utilisé jusqu'à l'âge du bronze


 Les perçoirs, armatures et divers

Les perçoirs : (planche VI)

Un seul perçoir avec retouches alternes a été trouvé (fig.1). A noter 1 lame à crête ayant pu être utilisée comme perçoir. Elle possède une extrémité pointue fracturée et des retouches sur la partie distale gauche (fig.2)

 


 

 


Perçoirs : L'outil habituellement appelé perçoir présente une pointe plus ou moins dégagée du reste du support. Il existe une grande variété d'outils pour percer en raison de la nature des matériaux à travailler et des types d'orifices à réaliser.
Percer une peau nécessite un outil résistant, ne cassant pas dans l'effort de traversée du cuir. Le poinçon d'os, de corne ou de bois de cervidé est parfaitement adapté à ce travail.
Ils sont appelés micros-perçoirs lorsque leur longueur est inférieure à
35 mm. Leur pointe est très fine, retouchée à partir d'une face ou de 2 deux faces.

 


Les armatures : (planche VII)

Les armatures ou pointes sont au nombre de deux dont :

  • 1 armature bifaciale fabriquée dans un silex gris clair à patine laiteuse avec des retouches écailleuses couvrantes. Elle mesure 6,1cm de longueur pour une largeur de 2,6cm et une épaisseur maxi de 1,1cm (fig.3).
  • 1 autre armature bifaciale à base droite, taillée dans un silex beige clair comportant des inclusions ; ses retouches sont couvrantes. Elle mesure 3,9cm de longueur pour une largeur de 2,9cm et une épaisseur de 1cm (fig.4).

A noter une pièce pouvant être assimilée, de par sa forme, à une ébauche d'armature. D'une longueur de 3,9cm pour une largeur de 3,2cm et une épaisseur de 1cm, elle possède une extrémité trapue et pointue retouchée sur les deux faces (fig.5).


 


Armatures ou pointes : Instrument varié ayant comme caractère commun d'être pointu.                Les armatures ou pointes sont très variées selon les cultures et les périodes et peuvent être classées dans 3 catégories : pointe en forme de feuille, pointe à pédoncule et ailerons et pointes plus ou moins triangulaires à base droite, convexe ou concave. Les bords de la pointe sont rectilignes ou courbes, denticulés ou encochés. Très peu de documents nous montre le mode de fixation de la pointe sur la hampe. Les liens servant à maintenir l'ensemble étaient en substance animale ou végétale.


Divers : (planche VIII)

Parmi le matériel recueilli sur le site, j'ai classé dans les divers :

  • 6 éclats denticulés (planche II, fig.10 et 11) dont 2 denticulés avec encoches (1 avec encoche retouchée et une encoche clactonienne, le second comportant une encoche unique). Ils ne sont pas dessinés.
  • 1 pic ou ciseau (?). Taillé dans un silex gris à patine blanche, large de 3,4cm pour une épaisseur de 2,9cm, il est retouché à larges éclats couvrants sur sa face supérieure et à retouches couvrantes irrégulières sur sa face inférieure. Fracturé transversalement, son identification demeure incertaine. (Planche VIII, fig.6)
  • 1 ébauche de hache ou enclume (?). En chaille, de forme triangulaire allongée, elle a pour longueur 11,9cm pour une largeur de 6cm. Elle possède quelques enlèvements larges sur sa face supérieure ainsi que de nombreuses esquilles sur son arête centrale. Sa face inférieure, presque plate est restée naturelle.
  • 1 extrémité proximale brûlée d'un pédoncule.

 


Pic : Silex allongé taillé assez grossièrement à large éclats dans toute sa longueur et sur tout son pourtour, affectant plus ou moins la forme de coin ou de pointe.
Ciseau : Silex taillé en biseau à l'une de ses extrémités comme un ciseau de menuisier. Tranchet allongé et étroit. Ce tranchant rectiligne peut être aussi convexe et certainement pour des raisons de solidité il peut être biface, mais très souvent uniface pour des exemplaires de petite taille. En général sa largeur est inférieure au tiers de sa longueur. Le même nom de ciseau est donné aux haches polies particulièrement étroites.

 

Les haches

 Haches taillées : (planche IX)

En chaille, les haches taillées sont au nombre de 2 :

  • 1 hache taillée mesurant 15,6cm de long pour une largeur de 7cm et une épaisseur maxi de 4cm. Du cortex présent sur sa face supérieure envahie une bonne moitié de sa surface, pour un bon tiers à sa partie tranchante et le reste dans une zone près du talon. Le reste de sa surface a été taillé à larges éclats. Sa face inférieure bombée naturellement, ayant gardée son cortex, comporte des retouches écailleuses courtes sur ses bords latéraux. (Planche IX, fig.1)
  • 1 hache taillée mesurant 15,3cm de longueur pour une largeur de 6cm et une épaisseur maxi de 3,8cm. Elle est taillée à larges retouches écailleuses envahissantes sur sa face supérieure. Sa face inférieure bombée naturellement, dont des plages de cortex subsistent comporte des retouches plus courtes écailleuses.   (Planche IX, fig.2)  


Haches polies : (planche X)

Les haches polies sont au nombre de 2 :

  • 1 hache polie en silex beige clair, dont le talon a disparu (fracture transversale). Sa partie tranchante est abîmée par des chocs d'utilisation (planche X, fig.1).
  • 1 hache polie, à flans convexes, dont le tranchant également convexe est resté intact et demeure fortement coupant (planche X, fig.2). La matière première utilisée est une roche dure, de couleur verte à grains fins. Elle a une longueur totale de 7cm pour une largeur de 3,8cm et une épaisseur maxi de 1,2cm.

 


On appelle hache, la partie tranchante en pierre d'un outil qui comportait un manche en matière périssable. Une première distinction peut se faire entre haches taillées et haches polies. Si certains pensent que la hache taillée est le plus souvent destinée au polissage, la perfection de certains tranchants, leur aspect usagé sur d'autres pièces, font de la hache taillée un outil achevé, certainement aussi efficace que son homologue poli.


 

Conclusion

 Sur un total de 199 pièces, la répartition nous donne :

Nucléus              

17

Eclats

132

Outils

34

Déchets et divers

16

 

Le nombre d'outils reste faible avec 34 outils soit seulement 17% du matériel recueilli. Cette industrie de Néolithique est caractérisée par l'utilisation d'un silex local de qualité médiocre ; cependant on a privilégié l'emploi d'un silex de meilleure qualité pour la fabrication de certains outils.

Les nucléi étant de petites tailles ont été utilisés jusqu'à leur extrême limite laissant supposer un manque de matière première.

L'absence de lames de grand module corrobore cette économie de matière première. De la chaille locale a servi à réaliser deux haches taillées.

Une roche dure à grain fin a été utilisée pour la fabrication d'une hachette polie, traduisant probablement une importation ou des échanges avec d'autres groupes.

La préparation des plans de frappe n'a pas été le souci majeur de ces hommes. L'industrie semble homogène, ce qui permet d'écarter l'hypothèse d'un éventuel mélange et, compte tenu de sa répartition, il semble que nous soyons en présence d'un petit site de débitage.

 

Bibliographie


JACQUINOT (Dr Honoré). -in Bulletin de la Société Nivernaise des Lettres, Sciences et Arts vol. X ,1879, p. 537.

MASSE (Alfred). - Monographies Nivernaises – Tome 1er, Canton de Nevers.1913, p.240.

BREZILLON (Michel). - La dénomination des objets de pierre taillée. - Paris, Ed. Du CNRS, 1983, 4e supplément à Gallia Préhistoire.

INIZAN (M.L.), REDURON (M.), ROCHE (H.) et TIXIER (G.) : Technologie de la pierre taillée (tome 4), Ed. du C.N.R.S.,1995.

 

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